Qui a dit qu’une femme ne pouvait pas se marier sept fois, si ça lui chante ? Certainement pas Evelyn Hugo, qui a employé tous les moyens possibles pour s’élever au rang de star hollywoodienne, dans le milieu cruel du cinéma des années 50. Retour sur le roman de Taylor Jenkins Reid, bientôt adapté en film par Netflix.
Toute sa vie, la presse people s’est chargée de mettre à jour ses mariages et ses divorces et de s’approprier des morceaux de sa vie, sans jamais vraiment réussir à la déchiffrer. Et ce qui semblait fluide dans les articles ne traduisait en rien la complexité de son parcours, que ce soit au niveau de sa carrière professionnelle, ou de sa vie sentimentale. En réalité, le monde entier ne savait d’elle que ce qu’elle leur laissait entrevoir, comme tant d’autres de ses collègues du milieu. Cette image, ce n’était pas vraiment les journaux qui la créaient, c’était elle qui voulait être vue ainsi : une femme complètement sexualisée définie par sa vie amoureuse publique, qui popularisait les films où elle jouait. En tout cas, c’est ce que semble dépeindre Evelyn, lorsqu’elle décide, à presque 80 ans, de rencontrer une journaliste tout à fait banale, Monique Grant, pour lui raconter son histoire, sa vérité.
Ce qui est sûr, c’est que Taylor Jenkins Reid ne cesse de nous surprendre, parce qu’on ne s’attend pas à la tournure que prend l’histoire d’Evelyn, ni de la relation qui se crée entre elle et la journaliste. Certes, on s’imagine qu’elle a vécu une vie tumultueuse, mais on comprend surtout que pendant des décennies elle a été tiraillée entre sa carrière et les gens qu’elle aimait, entre ce qu’elle montrait au monde entier et qui elle était vraiment. Mais la force d’Evelyn Hugo réside essentiellement en cela : elle a pris le risque d’être les deux dans une seule vie, de s’accorder le droit d’être « terriblement humaine » comme la décrira Monique Grant.
Néanmoins, son histoire appelle aussi à comprendre que nous n’avons pas beaucoup de temps pour devenir qui nous souhaitons être. Un jour nous avons vingt ans et nous nous pensons immortels. Le lendemain nous en avons cinquante, et nous réalisons que maintenant c’est le temps qui décide pour nous, et plus vraiment l’inverse.
Même s’il n’est jamais trop tard pour s’assumer, cette histoire nous donne envie d’être nous-même aussi vite que possible. Cela donne envie de faire, et surtout d’aimer qui nous voulons, que les seules limites sont celles que nous nous mettons, et surtout, qu’il importe peu d’être vrai avec tout le monde, tant que nous le sommes avec ceux qui nous rendent heureux.
Les sept maris d’Evelyn Hugo, de Taylor Jenkins Reid, éditions Hauteville (8,90€)
CELIA CAROLA