Wild Wild Country

Le récit dont nous allons vous parler prend place en Inde dans les années 1960 d’abord, puis en 1981 au fin fond des Etats-Unis, dans le village d’Antelope en Oregon, où une quarantaine d’habitants a vu sa douce torpeur ébranlée par l’arrivée d’une étrange communauté de milliers de personnes habillées en rouge.
Wild Wild Country est une série documentaire Netflix qui évoque un pan méconnu de l’histoire, celui d’une communauté  religieuse : les Rajneeshpuram, avec à leur tête un gourou indien portant le doux nom de Bhagwan Shree Rajneesh, également appelé Osho. Le programme se présente comme une enquête de six heures, en six parties, au cœur de cette secte oubliée et de son leader indien fascinant. (image mise en avant : © wild wild country netflix)

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© wild wild country netflix

Le travail colossal de Chapman et Maclain Way

Quatre années auront été nécessaires pour réaliser ce travail gigantesque composé d’images d’archives et de témoignages. Et des images d’époque, les frères réalisateurs n’en n’ont pas manqué. En effet, grâce aux télévisions locales qui avaient suivi de près l’affaire, ils tombèrent sur une véritable aubaine, des heures de rushs tournés par les journalistes d’antan. 

Chapman et Maclain Wayen, en plus de cette matière riche, récoltent de nombreux témoignages actuels et réussissent alors à nous transporter dans une excitante épopée entre passé et présent. La parole est donnée aux différents individus qui ont peuplé cette histoire, allant des simples habitants de ranch, aux hommes publics de l’époque, en passant par les adeptes eux-mêmes.

Deux visions semblent s’affronter : celle des riverains d’Antelope, simples retraités de l’Amérique profonde qui ont vu leur village racheté et renommé par les Rajneeshpuram, population soutenue par les autorités américaines ; et celle des membres historiques de cette secte, composée de tout un tas d’individus du monde entier dont certains intellectuels tels que des avocats ou architectes. Il est amusant de constater que ces derniers ont aujourd’hui un regard plus ou moins critique de ce mouvement auquel ils ont pris part.

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© wild wild country netflix

Figure fascinante d’une femme forte

La figure la plus captivante qui s’exprime avec une grande honnêteté dans ce documentaire, n’est non pas le gourou lui-même décédé en 1990, mais son bras droit et sa porte-parole : Ma Anand Sheela. On suit l’ascension de cette jeune femme indienne dont le rôle fut essentiel au déroulement des événements, jusqu’à une sombre histoire d’empoisonnement puis de tentative de meurtre qui causeront le départ hors des Etats-Unis de la communauté. 

Le rôle provocateur très médiatisé qu’elle tient lors de l’ascension des Rajneeshpuram, déconcerte autant qu’il passionne le spectateur. Si Bhagwan est certainement le cerveau de la secte, Sheela en est l’exécutrice. 

Sheela ne s’en cache pas, à l’époque sa priorité n’était pas la méditation et l’aspect spirituel, mais la création et le succès de la communauté Rajneeshpuram, quel qu’en soit le prix. Elle a fait des enseignements du grand maître un royaume capitaliste.

La détermination dont Sheela fait preuve et la main de fer avec laquelle elle gère la communauté sont troublantes. Ses qualités incroyables de meneuse l’amènent à certains excès qui rendent cette histoire encore plus captivante et qui distingue cette communauté parmi tant d’autres sectes religieuses.

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© wild wild country netflix

Secte venue d’Inde et puritanisme américain

La série documentaire offre une piste de réflexion intéressante sur le thème de la secte. Il est fascinant d’observer que des milliers de personnes suivent un homme à travers les continents par la force de ses mots. Bhagwan a passionné les foules occidentales qui se rendaient en Inde à la fin des années 70, en quête de spiritualisme et d’un nouveau modèle de pensée, leur offrant un schéma de vie idéalisé et loin des modèles dominants de l’époque.

Nous ne savons pas véritablement qui est Bhagwan, simple charlatan ou véritable messie ? Orateur de talent qui propage une vision nouvelle de l’Homme ou semeur de troubles ? 

Il aurait pu finalement s’agir de cette secte ou d’une autre. Mais la communauté de  Rajneesh se distingue par l’ampleur médiatique qu’elle a suscitée, dans une Amérique puritaine, avide d’un bouc émissaire au comportement subversif. Le gourou indien, prônant l’amour libre et la provocation, a donc rapidement été vu comme un sex guru aux Etats-Unis, toile de fond bien-pensante de cette affaire où la communauté a migré.

Wild Wild Country est une série captivante parce qu’elle aborde la thématique de la secte, sujet très controversé dont il est rare de trouver autant de traces filmées ; et par répercussion d’autres sujets comme la collectivité, la manipulation des masses ou la manipulation politique de l’Etat. 

La série documentaire a cela de très efficace : elle ne prend pas partie, ne donne pas de vision unilatérale de ces événements, mais expose avec beaucoup de respect les différents points de vue. Tout en gardant un rythme haletant qui éveillera votre curiosité. 

Wild Wild Country, Chapman et Maclain Way, 2018, disponible sur Netflix.

Article rédigé par Eloïse.

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